Grand dialogue, la confiance se construit
- Par Marie-Claire NNANA
- 02 oct. 2019 11:49
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Alors que le Grand dialogue national poursuit son petit bonhomme de chemin, dans les couloirs du Palais des Congrès de Yaoundé mais aussi dans les cœurs, où il conquiert une place que les plus sceptiques et les plus critiques ne lui prédisaient pas, on doit se réjouir d’un fait rare et inédit : le soutien franc et appuyé de François, le souverain pontife, à la veille du grand événement. L’une des plus grandes autorités morales de notre temps, guide spirituel mais aussi personnalité respectée et adulée de par le monde, pour son sens du jugement, son humilité et son intégrité, a exprimé son soutien indéfectible au Grand dialogue national initié par le président de la République pour mettre fin aux tensions dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest et réconcilier les Camerounais. Intervenant après l’adoubement sans équivoque de l’Organisation des Nations unies, du Commonwealth des Nations, de l’Union africaine, de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale et de la CEMAC, la déclaration publique du pape François en faveur du Grand dialogue national est un bon point pour la diplomatie camerounaise.
Un point qui vaut son pesant d’or dans un contexte où la voix du Cameroun à l’international est délibérément brouillée par des activistes camerounais instrumentalisés par des politiciens du cru. Au-delà des mots, c’est l’empathie de l’homme d’Eglise avec les Camerounais qui retient l’attention, comme si le pape « avait mal à notre poitrine. » Le successeur de Saint Pierre déclare en effet « s’associer aux souffrances et aux espérances du peuple bien-aimé camerounais », pour lequel il invite le monde à prier, afin que « le dialogue puisse se révéler fructueux », et conduise à « des solutions pour une paix juste et durable ». Les Camerounais qui sont pour une grande part croyants et pratiquants, se réjouissent de cette bienveillance paternelle, bien au-delà des chapelles religieuses. L’intérêt du pape est en outre une pression supplémentaire pour les participants au Grand dialogue national, dont le pari est désormais de matérialiser les espoirs de tout un peuple, et aussi ceux des partenaires et observateurs amicaux qui croient en notre pays et à sa résilience légendaire. Sur les hauteurs de Nkolnyada où est niché le Palais des Congrès, précisément, les responsables du processus rêvent de tenir un tel pari.
Si l’on n’en est pas à l’heure du bilan, on constate néanmoins qu’en 48 heures d’échanges francs et parfois passionnés, on tient des résultats que personne ne prenait pour acquis : la participation et la liberté de parole, signes que la confiance se construit. En ce qui concerne la participation, les figures emblématiques de la cause anglophone sont toutes présentes, de même que l’élite politico-sociale, ainsi qu’une bonne brochette des personnalités de la diaspora invitées. Les jeunes combattants repentis, très présents, ne sont pas avares d’expressions d’enthousiasme ou d’impatience juvéniles. Faut-il vraiment s’en étonner, certains médias camerounais et français se plaisent à mentionner comme un fait majeur l’absence des leaders sécessionnistes, oubliant que le Grand dialogue est loin d’avoir fermé ses portes, et que tout demeure possible. Ils feignent surtout d’ignorer que les bandes armées rivales qui écument les forêts du Sud-Ouest et du Nord-Ouest ne sont plus depuis longtemps sous l’emprise des leaders sécessionnistes, mais plutôt, sous celle de l’appât du gain dicté par la misère. C’est d’ailleurs avec amertume que les repentis témoignent du désarroi de ces jeunes, baptisés pompeusement hier « Freedom fighters » et abandonnés à eux-mêmes aujourd’hui, sans perspectives d’avenir. Du moins avant leur prise en main par le Comité national de désarmement, de démobilisation et de réintégration (CNDDR).
Quant à la liberté de ton, actée dès le premier jour de ce Grand dialogue, elle est sans aucun doute l’un des points marquants de ce forum. Malgré les rappels à l’ordre du Premier ministre, sur la nécessité de s’en tenir aux thèmes circonscrits par les organisateurs, les patriarches représentant les dix régions n’ont pas craint d’extrapoler allègrement pour pointer du doigt d’autres problématiques, voire des sujets tabou… Morceaux choisis :
« Il faut adapter le travail des pères fondateurs au monde moderne. » (Aboubakari Abdoulaye)
« Le problème, c’est que vous avez peur de dire la vérité au chef de l’Etat. » (
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