« La présence camerounaise est appréciable »

Le secteur des supermarchés au Cameroun s'est récemment enrichi d'une nouvelle plateforme de vente, précisément le Centre commercial Playce où de nombreux magasins sont installés. Comment peut-on apprécier ce dynamisme? 
Ces dernières années, le paysage de la grande distribution a connu d’importantes transformations au Cameroun. On assiste ainsi à une tangible modernisation des formules de présentation et de diffusion des produits. Des groupes locaux naissent et s’étendent au moment où de grandes unités comme Carrefour s’implantent avec fermeté et conviction si l’on s’en tient à l’importance de leurs investissements. Ces implantations massives peuvent s’apprécier de plusieurs manières. D’abord, elles indiquent, à n’en point douter, que le Cameroun dispose d’une classe aisée et moyenne prête à s’ouvrir à de nouveaux modes de consommation. Ensuite, elles mettent en exergue les raisons (snobisme, quête de confort, qualité des produits, contraintes de temps, découvertes de nouveaux formats de distribution…) qui inclinent les ménages à modifier leur comportement d’achat. Enfin, elles exposent les mesures macroéconomiques (ajustement des politiques économiques), fiscalo-douanières (baisse de droits de douane à l’importation), administratives et juridiques (facilités d’accès à la propriété foncière) qui attirent les groupes étrangers confrontés à la saturation de leur marché. L’effervescence dont il est question ici peut donc être perçue comme quelque chose de bénéfique pour l’économie nationale. Cela dit, il ne faut pas perdre de vue que l’installation des grands groupes dans un pays peut présenter des risques politiques (lobbying pervers), économiques (désorganisation de la distribution domestique) et sociaux (expropriation) susceptibles de mettre à mal le fonctionnement économique et même politique interne.
Peut-on aussi considérer cela comme une réponse à la demande de plus en plus croissante ?
En effet, la modernisation de l’appareil de distribution dans des pays comme le nôtre découle d’une demande de plus en plus croissante. Mais, il s’agit d’une demande portée davantage par une classe de consommateurs aux revenus appréciables (expatriés travaillant dans la grande finance, la diplomatie, l’industrie ; nationaux de statut supérieur ou moyen, touristes et membres de la diaspora habitués à certains standings de consommation, etc.). Bien plus, c’est une demande qui s’exprime plutôt en milieu urbain et périurbain que rural ; une demande formulée pour des produits qui entrent en concurrence avec  plusieurs autres élaborés localement. L’on comprend ainsi pourquoi, les enseignes nationales et internationales d’importance préfèrent s’installer dans les grandes agglomérations habitées par des populations, qui par atavisme culturel, mimétisme social ou simple curiosité, alimentent des marchés où de nombreux besoins restent à satisfaire.
Quelle est l’ampleur de la présence camerounaise dans ce secteur de la grande distribution ? 
La présence étrangère remarquée ne traduit pas une réduction des nationaux à des rôles périphériques. La présence camerounaise existe. Elle est même appréciable à certains égards. En effet, la diversification des pôles d’approvisionnement due à la mondialisation permet aux hommes d’affaires camerounais de s’investir avec plus d’opiniâtreté dans ce secteur. Ce qu’il faut remarquer pour certains d’entre eux, c’est que la grande distribution ne se cantonne plus dans un volet commercial de masse en raison d’une certaine saturation des besoins de base. De la sorte, l’accent est mis non pas sur une production standardisée, mais sur la qualité afin de répondre aux exigences d’une clientèle locale segmentée. Mais, il y a plus. La grande distribution camerounaise qu’elle soit alimentaire ou non bénéficie de nombreux atouts à savoir : des centrales d’achat et des économies d’échelle qui permettent de réduire les coûts, le libre-service qui limite les charges salariales, des poss...